Traduction : Pierre-Paul Durastanti





Science-Fiction / Fantastique / Fantasy
Le roman se déroule d’après le point de vue du héros, Takeshi Kovacs, criminel emprisonné qui est embauché par Laurens Bancroft pour résoudre le meurtre de celui-ci. Dans ce futur lointain, l’immortalité est à portée de bras (surtout pour les bras riches) : si votre corps (ici appelé enveloppe) meurt, vous pouvez être « ré-enveloppé » dans le corps de quelqu’un d’autre, dans la majorité des cas dans celui d’un criminel qui purge sa peine.
Donc Takeshi est ré-enveloppé dans un corps sur Terre et engagé pour résoudre cette énigme. J’ai adoré son ton, à la fois cynique, désabusé et lucide sur l’existence. Ce personnage est l’un des plus individualistes et cohérents qui m’ait été donné de lire. Ce n’est pas si évident de créer un anti-héros qui ne vire pas complètement dans le bien pour conserver l’amour du lecteur. Takeshi fait les choses qui lui semblent juste en fonction de sa propre morale et ça marche. Ce qui fait aussi la force de ce personnage, c’est son background chez les Diplos. Nous avons régulièrement des flash back intégrés à ses réflexions qui nous permettent d’en apprendre plus sur sa vie passée. J’avoue que certaines choses sont restées floues pour moi, lire ce livre m’a pris beaucoup de temps et je n’étais pas à 100% concentrée à cause de mon travail qui m’a vampirisé tout mon temps libre des mois de mai et juin.
L’enquête du meurtre de Bancroft était intéressante. Le personnage même de Bancroft était chouette, plus complexe et intriguant qu’à première vue. J’ai aussi beaucoup aimé son acteur et son incarnation dans la série qui lui rendait bien justice. Sa femme par contre m’a été antipathique du début à la fin. Pour poursuivre sur les personnages, j’ai bien aimé Kristin Ortega, même si là encore, elle est davantage mise en avant et sublimée dans la série. Les rares alliés que se fait Takeshi permettent de compléter le tableau et de découvrir la violence et l’injustice de ce monde du futur.
La conclusion sur la mort de Bancroft est bien trouvée, ça se tient mais je n’aurais jamais pu le deviner !Néanmoins, on perd un peu le fil de ladite enquête. Il se passe tellement de rebondissements et de contretemps qu’à la résolution de l’enquête principale on a presque oublié comment tout avait commencé.
Les idées développées dans ce roman au sujet de l’immortalité sont classiques en SF mais toujours intéressantes à suivre. C’était d’ailleurs très bizarre puisque j’ai moi-même abordé certaines thématiques dans mon roman de SF qui devrait sortir l’an prochain. Notamment cette histoire de puce qui est ici poussée à son extrême et cette pratique de ré-enveloppement. Il va falloir que je mette une note pour préciser que j’ai lu Carbone Modifié après avoir écrit mon roman ! (même si finalement Carbone Modifié date de 2003 en VF). Il reste des idées passionnantes sur la mort, les liens entre les individus, l’âme humaine et les sempiternels clivages entre les riches et les démunis.
La description du roman nous promet une histoire dopée et à déconseiller aux cœurs fragiles. C’est vrai que le sang coule et que la torture est présente et bien dérangeante. Ni le monde, ni Takeshi ne font dans la dentelle. La violence est omniprésente et n’a plus vraiment de limite dans un monde où la mort n’est plus une finalité. Il y a eu des scènes violentes, intenses, difficiles à supporter quand on s’imagine réellement ce qu’elles impliquent : des tortures en mode virtuel, du snuff, des représailles… J’ai aimé l’esprit des Diplos même si leur justice est expéditive.
J’ai aimé l’univers et les personnages mais je m’attendais à plus qu’une enquête policière dans un monde futuriste. Il m’a manqué un peu plus d’implication et d’empathie, d’où ma note qui n’est pas à la hauteur de l’univers incroyable développé ici.
Et c’est là que la série entre en scène car elle a été, à mes yeux, une très bonne adaptation avec juste ce qu’il faut de différences pour impliquer davantage le public et apporter une vision complémentaire. Les scénaristes ont rendu le tout plus personnel pour Takeshi. Il gagne en humanité, sans toutefois virer dans le héros non plus, il reste à la lisière de l’anti-héros. J’ai beaucoup aimé le traitement de la série et leurs changements. En particulier le personnage de Quell sur qui je ne vais rien dire pour ne pas spoiler et celui de Kristin Ortega qui prend beaucoup plus d’ampleur et de charisme et l’IA de l’hôtel à qui on s’attache bien plus. Visuellement, la série colle parfaitement à l’idée que j’en avais, ils ont d’ailleurs repris des scènes avec la couverture du roman français. L’immersion était totale. Passé le décalage entre le Takeshi dans le corps de Ryker (caucasien) et le vrai Takeshi (asiatique) on s’attache bien à notre héros et j’ai bien mieux compris son passé grâce à la série.
Je vous conseille de regarder cette série après avoir lu le livre (ou bien si vous ne voulez pas le lire du tout). C’est une très bonne adaptation je trouve. Quant au roman, il est bourré de bonnes idées et d’actions et je vais très certainement me prendre la suite directe Anges Déchus.
Il y a de l’idée vraiment dans ce roman mais à mes yeux ce n’était pas assez abouti, assez travaillé. Le background est expliqué dans le prologue mais après on a plus aucune information de comment les BOA continuent de naître… est-ce héréditaire ? Il nous manque beaucoup de cartes pour bien comprendre le contexte et être emporté dans l’univers. Je suis restée très en périphérie, incapable de m’imaginer comment ça se passe dans le reste du monde ni quelle serait ma place là-bas. J’aurais préféré que l’auteure s’attarde dessus plutôt que de décrire trente-six fois les tenues des jeunes gens.
Globalement c’était un peu trop manichéen à mon goût avec les humains gentils et les BOA (des vampires en fait) méchants, même s’il y a des résistants et des individus plus compréhensifs chez les BOA, les humains sont réduits en esclavage et gâchés…après avoir été exterminés. Ce qui est complètement contre-productif puisque les BOA ont besoin de sang humain pour survivre. Alors pourquoi torturer et tuer des humains déjà en sous-nombre ? Le schéma est assez classique du coup et n’apporte pas grand-chose à la réflexion car nous sommes dans un énième tableau : maître abusif/esclave.
Nous suivons les 6 jeunes rendus immortels pour la loterie selon le point de vue de deux filles du groupe, plus nous avons le point de vue d’un résistant et de manière sporadique de deux ou trois autres personnes, ce qui est assez maladroit car ces passages là n’apportent pas grand-chose alors que l’auteure aurait pu approfondir ses propos du côté psychologique et du contexte. Il a été difficile pour moi de m’attacher aux personnages ou de ressentir beaucoup d’empathie car leurs comportements, et surtout ceux des deux héroïnes Oxana et Cléo, sont clairement incohérents. On nous décrit Cléo comme une séductrice qui a vécu dans une bulle (littéralement, elle n’est jamais sortie de son appartement) alors qu’elle ignore ce qu’est un baiser et est d’une passivité à toute épreuve. Ce n’était pas du tout crédible. On ne peut pas être une séductrice (dans tous les sens du termes, pas seulement femme fatale) et en même temps d’une telle naïveté. En outre elle a été élevée sciemment pour plaire aux BOA mais ne s’est jamais demandée comment ça allait se passer quand ils croqueront dans sa jugulaire.
A l’opposé on nous présente Oxana comme une jeune fille combattive qui veut se révolter contre le système mais qui ne fait quasiment rien. Pour la rebelle, on repassera. Les quelques fois où elle a un sursaut de révolte, c’est amené d’une manière peu crédible. Seuls Dennys et Killian sont parés d’une histoire intéressante qui rend leurs réactions crédibles et leurs personnages plus touchants. Les autres jeunes ne seront que peu exploités. Les organisateurs de la loterie sont tous des pourris et visiblement, il suffit de demander au technicien de trafiquer les numéros pour que ça passe… la Française des Jeux serait ravie de l’apprendre !!
![]() |
Mes coups de cœurs 2017 |
Objectifs 2018 :
![]() |
Je suis contente de mon bilan de cette année en SF car c’était presque toujours de gros pavés ! |
![]() |
Une braise sous la cendre a été l’une de mes révélations de l’année ! |
![]() |
J’ai enfin terminé Eternité et j’ai fait une cure de Lionel Davoust ^^ |
![]() |
Grosse déception pour Nosfera2, le reste a été un régal ! |
![]() |
Je me plais bien plus que je ne le pensais dans le young adult ! |
![]() |
Un peu de diversité de temps à autres 😉 |
![]() |
Screenshot du film Les Gardiens de la Galaxie |
![]() |
Illustration de Justin Coro Kaufman |
![]() |
Illustration de Josef Bartoň |
Le rythme est très rapide, ce qui est courant en littérature jeunesse et est toujours un peu déroutant pour moi. Néanmoins l’auteur sait de quoi il parle et il n’abuse pas des phrases choc et courtes très à la mode en ce moment. Il y a suffisamment de descriptions et d’introspection dans ce roman qui amène le lecteur à une certaine réflexion, en particulier pour comprendre comment fonctionnent les sauts dans le temps et pouvoir ensuite emboîter les pièces du puzzle temporel.
Quelques points m’ont chiffonnée suffisamment pour que je vous en parle, donc je commence par eux pour terminer sur le positif. J’ai eu du mal avec Chora au départ. Notre héroïne vient de perdre ses parents dans une explosion assez étrange. Ses réactions au début m’ont dérangée, surtout vis-à-vis de Théo, le beau gendarme de 20 ans (elle en a 16), qu’elle tutoie très vite alors que c’est la première fois qu’elle le voit et qu’il est un représentant de l’ordre et non son petit voisin. Elle est orpheline depuis un jour et songe déjà à flirter… Son comportement général est assez difficile à cerner. D’un autre côté, c’est une adolescente qui se sait en sursis : son cœur peut lâcher à tout moment. Cela fait relativiser, elle n’a pas de temps à perdre.
Théo est présenté de manière grossière. J’entends, qu’un panneau clignotant au-dessus de sa tête annonçant « je suis le flirt de l’héroïne dans cette histoire » aurait été tout aussi subtil. Les autres adultes sont un peu stéréotypés à mon sens : la cheffe de la sécurité « méchante » qui surgit toujours au bon moment juste pour mettre la pression et le savant fou physicien (qui veut envoyer des déchets radioactifs dans le passé pour réduire la pollution de la terre… il lui manque des notions d’écologie à ce brave monsieur). Bref, le départ aurait mérité qu’on s’y attarde un peu plus.
Heureusement, ces défauts sont ensuite gommés au fil de l’histoire. Le lien entre Théo et Chora se développe et trouve tout son sens avec les sauts dans le temps. Les deux jeunes gens sont très touchants et leur évolution respective est très appréciée. Ils murissent chacun au contact de l’autre et toutes les questions trouvent leur explication. Je les ai beaucoup aimés une fois les premières maladresses passées, surtout Théo qui s’avère bien plus profond que les premières pages ne le laissaient entendre.
La vision de l’auteur sur le voyage dans le temps est originale, attrayante et passionnante. C’était une très bonne surprise à ce niveau-là où j’ai pu donner libre cours à mon imagination pour essayer de deviner la solution. Tout du long du roman j’étais aux côtés de Chora pour essayer d’en apprendre davantage sur ce phénomène et si ça avait un lien avec sa pathologie cardiaque (ma seule déception, on ne s’en sert que pour accentuer l’urgence).
Le roman est prenant et rempli d’une émotion à laquelle je ne m’attendais pas. Le plus de cette histoire concernait tous les passages dans le passé où l’on découvre des éléments sur plusieurs des personnages. J’ai été touchée et le tout était très bien mené.
Donc au final, malgré un début un peu mitigé, la suite m’a bien plu et j’ai passé un agréable moment.
Que dire de ce roman ? Déjà, c’est un sacré pavé qui m’a occupé presque tout le mois d’août (du 11 au 02 septembre, ce qui est énorme pour moi). C’est un grand format de 740 pages où je dirai 400 à 500p auraient largement suffi. J’ai retrouvé une partie des défauts évoqués dans le premier tome d’Elévation, à savoir une multitude d’idées qui se succèdent sans réel lien. Ce roman aurait pu être découpé en plusieurs tomes, cela aurait sans doute mieux valu d’ailleurs, cela aurait atténué cette impression que l’auteur voulait nous en mettre pleins les yeux avec 36 idées à la fois.
Nous suivons une dizaine de personnages et nous avons aussi à chaque fin de chapitre un extrait de livres, d’interviews ou de journal. Le pire c’est que ce livre est très intéressant ! Je n’ai pas bâclé une seule page de ce pavé (enfin si, quelques extraits répétitifs sur la fin, allez, disons 10p sur 740 !). Je voulais connaître le fin mot de l’histoire, je voulais savoir ce qu’était réellement cet artefact trouvé aux abords de la Terre par l’astronaute Gérald Livingstone.
Je ressors donc avec une étrange impression d’avoir lu plusieurs livres passionnants en un mais qui était bien trop long avec un final frustrant où je ne n’ai pas toutes les réponses. Le fameux « tout ça pour ça ». Honnêtement j’en attendais plus et j’attendais même un lien avec son cycle Elévation plus important que cela. J’ai même cru un moment que c’était une préquelle mais il semblerait que non. Du coup, il a fait un clin d’oeil avec ses dauphins… qui a dû durer une centaine de pages pour rien.
Vous vous retrouvez donc avec des idées en vrac, très intéressantes mais pas exploitées jusqu’au bout : l’élévation du niveau de la mer, les cyborgs, les robots, les extraterrestres, la vie éternelle, les riches qui contrôlent le monde, la réalité virtuelle qui prend le pas sur la vraie vie, la conscience collective sur l’internet etc. Bref, que des choses super à aborder mais qui auraient mérité presque un livre chacune pour être traitées à fond.
Le principal thème reste le contact extraterrestre. Là aussi l’auteur prend une drôle de direction, aux antipodes de ce qu’on imagine dans les nombreux films et autres livres. C’était original, atypique et bien vu mais un peu trop long et emmêlé dans d’autres idées qui rendent le tout flou et difficile à comprendre. L’intérêt final m’a complètement échappé.
C’est assez compliqué pour moi de résumer mon avis tant il y a d’aspects développés. Je suis à la fois frustrée et contente de ma lecture. Une chose est sûre : ce pavé est vraiment intéressant !
Nous faisons la connaissance d’un équipage principalement constitué de dauphins élevés à la sapience, appelés des fen (pour en savoir plus sur le principe de l’élévation, je vous invite à lire mon avis sur le tome précédent), d’un chimpanzé élevé aussi et d’une petite dizaine d’humains. Tout ce beau monde se trouve dans un vaisseau spatial (en grande partie constitué de zones immergées pour les fen) et tombe sur un cimetière d’épaves extraterrestres. Pourchassé par des Galactiques mécontents, le vaisseau se cache sur une planète aquatique. L’objectif est donc de réparer le vaisseau et d’essayer de s’échapper alors que la planète est assiégée par les différentes races extraterrestres qui se font la guerre pour capturer notre équipage.
Nous suivons une belle brochette de personnages, une dizaine sans compter les points de vue des différentes races galactiques. Malgré tout, je n’ai jamais été perdue, ni ne me suis demandée qui est qui car les chapitres sont courts et l’intrigue ne cesse d’évoluer, c’est à dire qu’il y a des ellipses temporelles entre chaque point de vue : ce n’est ni répétitif ni pour autant trop obscur. La narration est donc ici bien mieux maîtrisée à mon sens que pour le premier tome.
Les personnages sont tous très intéressants, avec leurs qualités et leurs défauts. Ils sont tous riches en passé, motivation ou dans leur évolution. Les humains, les fen et le chimpanzé sont tous traités ici à égalité. Les humains sont les patrons des deux autres races (puisqu’ils les ont « élevés »), néanmoins on ressent beaucoup moins d’arrogance et de supériorité que dans le précédent tome. Les humains sont des patrons compatissants, ils n’ont pas liés leurs « clients » avec des contrats comme c’est la règle dans l’espace. Fen et chimpanzés sont libres, même s’ils conservent un certain respect hiérarchique envers les humains. Ces derniers sont toutefois relégués au second plan, le capitaine du vaisseau est un fin, son second aussi. Les humains restent des garants, vers qui ils vont encore se tourner pour demander un appui, mais les fen et les chimpanzés sont autonomes. Toshio, l’un des héros humains reçoit d’ailleurs ses ordres de la part des fen.
J’ai donc apprécié cette vision des choses, où l’homme n’est pas un géant supérieur. J’aime aussi la vision qu’ont les Galactiques de nous. Nous qui ne répondons pas à la norme, qui sommes des « jeunes loups » dont les réactions les étonnent toujours. Les humains donnent un grand coup de pied dans la fourmilière galactique et c’est assez jouissif.
J’ai beaucoup aimé les nombreux thèmes qui sont abordés dans ce gros pavé que j’ai lu avec une grande facilité. Les fen conservent leur identité de dauphins avec des traits propres à leur espèce (principalement du Grand dauphin, Flipper pour ceux qui connaissent) et pourtant on parle de harcèlement sexuel, de racisme, de mutinerie, de dieux, de philosophie etc. La frontière entre comportement delphinien et humain est parfois floue. Toutefois certains traits comme la fourberie sont typiquement humain et c’était donc étrange de les associer à des dauphins. Les fen s’expriment de plusieurs manières différentes, dont du ternaire à grand renfort de poèmes et haïkus. C’était un peu déstabilisant au début et puis ensuite c’est devenu très fluide et musical.
Il y a de nombreux rebondissements, l’intrigue est riche, l’univers dense, les personnalités variées, les interactions intéressantes. Bref, ce fut une lecture passionnante, enrichissante et très originale. Je suis ravie d’avoir pu me pencher sur ce roman, cela aurait une perte dans ma culture générale et scientifique.